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CERCLE ARCTIQUE AVEC REGIS FENDER EN STRIDA 2010

Art et Poésie dans un monde cycliste incongru

Avril et Mai 2010

Allez savoir pourquoi ! Le Lorrain Régis Fender tutoie les extrêmes. Après sa traversée du Sahara le voilà en Laponie à la rencontre du Cercle Polaire. Ses textes et photos sont poésie et méditation.

x1) Né en 1972, Régis FENDER partage sa vie de Lorrain entre la famille, l’écriture, le vagabondage et le handicap mental. « Hommes de tous les métiers », il a été musicien, ouvrier agricole, cadre, menuisier, travailleur social, livreur, etc.

Aujourd’hui il s’est pris de passion pour rouler, chaud ou froid, en vélo pliable de ville ( !) avec une seule vitesse de la marque Strida !



x2) Ses écrits mêlent réel et poésie, dans un déferlement d’images, de rythmes et de questionnements, qui les rendent particulièrement vivants.

Ce "reportage" reprend des extraits de ses textes et de ses photos (Noir et Blanc). Celles-ci n’ont pas toujours un lien direct avec les textes.

x3) L’aventure de Régis Fender est d’autant plus « hors norme » qu’en Belgique les Transports En Commun (TEC) font leur pub pour un abonnement « Bus et Vélo Pliable (de la marque Strida !) avec comme slogan : « La liberté en plus avec et après le bus ».

Mais notre aventurier n’a rien à voir avec cela.



01) Désormais tous les textes, comme les photos sont de Régis :

« L’écho d’une parole, c’est :
Entre 3200 et 3500 kilomètres en Strida, donc à une seule vitesse
Six kilos de bagages et trois d’eau
Une vingtaine de crevaisons
Une moyenne de 120 km par étape et la plus grande à 160
Sept semaines de voyage entre Guénange (banlieue de Metz) en Lorraine et Jokkmokk en Laponie

02) Trois semaines d’affilée de froid et de pluie … puis quatre de soleil, et quelquefois de froid !

Des paysages aussi variés, et sauvages, que les grosses agglomérations, les montagnes, les lacs et marécages, les forêts, la mer, la toundra, les iles, les grands espaces, …



03) Des rencontres insolites
Des serpents, des rennes, des élans, des blaireaux, des renards, des oiseaux polaires, …

Des campements sauvages, et quelquefois, inédits (stand de tir, toilette, vestiaire, forêts, bord de mer, étangs, lacs, nationale, …)

Des centaines de photos.

Enfin, des récits et des portraits qui en sont … l’écho, la résonance.

04) De longer ainsi un fleuve, les pensées finissent par se confondre avec ses eaux. Parfois, douces et profondes. D´autres fois, rapides et tumultueuses.

Quelquefois, sombres et opaques.

Certains peut-être sont morts de ne pas avoir vécu ?



05) Cinq pans de toile translucides.

Voilà à quoi se résume mon horizon d´un soir. Aucun espace, aucune perspective.

Cinq pans de toiles translucides.
Aucun doute, ce sont mes larmes qui coulent sous l´abside.

D´un coup comme ca, sans heurt, elles m´ont rappelé l´évidence :

C´EST PAS LA VIE, C´EST NOUS QU´ON MEURT !

06) Puis vint Lübeck, hautaine mais accessible. D´une évidente beauté, d´un charme désuet. Pourtant je l´ai aimé.

En mémoire de la ligue qu´elle a supporté, des arts qu´elle a exportés et de mon grand ami (*) qui l´a tant aimé ... avant de s´en aller.

(*) … à la mémoire de Berni.



07) J´imaginais Trelleborg une ville tentaculaire sur laquelle me yeux trébucheraient sans cesse.

Et bien, non. Pas du tout. Tout juste quelques feux tricolores à l´angle des grandes rues. Des ruelles proprettes et pavées.

Un centre ville aéré, bien comme il faut avec de larges perspectives et des immeubles pas trop hauts.

08) Des heures à caboter sur les routes et les sentes de Suède.

Sur le littoral, au cœur des forêts. Sur les bords des lacs, au milieu des prés. Et toujours cet épais rideau de brume qui avale l´horizon.

Au delà de 50 ou 100 mètres, on ne voit plus que cette crème épaisse qui accroche le lointain et tout ce qui la traverse.



09) Des journées entières à mouliner sur cette langue d´asphalte bordée de pins, avec pour compagnons, rennes, lapins, geais, et je ne sais plus très bien.

Et des instants magiques, comme cet élan qui, au crépuscule, est venu frôler ma tente de son vol léger.

10) Une herbe drue brossée aux vents du Nord, avec çà et là quelques rochers barbouillés de lichens, osselets gigantesques que plus personne ne jette.

Cinq cents mètres plus loin le disque, ou plutôt l´ellipse de la Baltique ... lisse.



11) Toujours ce vent à décorner un viking et à faire ployer un cycliste. Dans la position assez peu esthétique, mais tellement aérodynamique du "gorille", je viens finalement d´atteindre la banlieue de Stockholm (soit 2000 kilomètres).

Je me lancerai dans une semaine à l´assaut du Grand Nord et de la Laponie.

12) A l´aéroport je dors.
Des heures déjà que je suis là
La tête par ci, les bras par là.
Cœur à midi, doigts vers le bas
Mais comme tout bouge autour de moi
c´est décidé ... je reste là.

*17 heures sur la même chaise (aéroport de Skavsta)



13) Dans la province du HÄLSINGLAND et dans celle du MEDELPAD, le paysage gonfle sensiblement jusqu´à faire éclater, ici ou là, de petites montagnes qu´un vent gaillard frappe sans retenue.

14) Comme le précise la relativité selon Einstein, le déplacement dans l´espace réduit l´écoulement du temps.

Concrètement, si je pédale pendant que vous êtes assis devant votre ordinateur, le temps passe moins vite pour moi que pour vous.

Et c´est bien plus qu´un concept, c´est une réalité ... restreinte.



15) Je ne cessais alors de valdinguer d´un bout à l´autre de l´histoire Sami (*), et finis même par me prendre les pieds dans ma propre histoire.

(*) : Laponie.

16) "Tu as 38 ans n´est-ce pas ? Je suis yougoslave. J´ai 80 ans. J´ai travaillé avec des hommes de toute nationalité et j´ai connu un turc qui ne mangeait pas de viande, comme toi et qui était grand et sec, mais tellement fort et résistant.

Bravo ! Et encore bravo. Tu es brave, je peux le voir.

Au moins quand tu seras vieux tu pourras t´asseoir avec tes petits-enfants et leur raconter le monde plutôt que de regarder la télévision. Bravo ! Encore bravo !"



17) " Bonjour, où puis-je rejoindre la route 67 ? "

" Tu n´as qu´à fendre la ville tout droit et tu la trouveras. Mais où vas-tu ? "

" Je tente de rejoindre la Laponie à vélo. "

" La Laponie ? Je n´irai jamais là-bas."

18) A peine a-t-il franchi l´encadrement de la porte que ses sabots retentissent à nouveau dans le corridor.

" Avec ce vélo ??? Mais c´est un vélo d´enfant ! "
" Les roues peut-être, mais on l´enfourche comme un cheval tellement il est grand. "
" Il n´a qu´une seule vitesse ? "
" Une seule, oui. "
" C´est un vélo bien étrange. "

Quelques instants plus tard, il grimpait, avec prestance et dignité, dans une Cadillac décapotable ... des années 50.



19) Il marque un temps d´arrêt, scrute l´horizon puis mâche une phrase dans un anglais approximatif.

Cherchant ses mots sur l´enseigne lumineuse qui lui fait face, il m´explique qu´il va pêcher le saumon à cinq kilomètres de là puis, du revers de la main, éponge l´écume de bière qui flotte encore sur sa moustache.

20) Puis viennent les premiers mots, tremblants, hésitants. Un peu comme un frisson.

" L´hiver il peut faire jusqu´à -45 degrés. C´est difficile, tout est gelé. "

"Il faut avoir le cœur sacrément chaud pour résister à de telles températures." ai-je alors songé, en plongeant le nez dans ma tasse de café.



21) " C´est à vous le vélo ? "

" Oui. "
" Mais d´où venez-vous comme ca ? "
" De France. Quelques 2600 ou 2700 kilomètres d´ici. "
" Non. C´est incroyable. Avec une seule vitesse et de si petites roues. Vous êtes un ironman, Monsieur. "
" Non, pas vraiment. "

" Si, si, Monsieur, vous êtes un ironman. "

22) C´est un jour sans vent. Peut-être un dimanche.

Tout semble parfaitement à sa place, jusqu´à cette feuille, rieuse, qui vient juste de se détacher de l´arbre.

Cette feuille a un nom, je l’ai rencontrée. Elle s’appelle Viktor.



23) " Voilà quatre semaines que je suis en voyage. Quatre semaines à parcourir l´Europe. L´Allemagne, la Lettonie, la Lituanie, l´Estonie, la Pologne.

Et la Finlande. Et la Norvège aussi.

Maintenant la Suède.
... (silence) ...

24) Juste derrière cette brume, ce voile épais, se trouve quantité de choses.

De l’érudition, de l’humour, beaucoup d’humour, de la bonté, de l’originalité, de la beauté et de l’amour … tellement d’amour.

Quelques humeurs aussi, et de la poésie.



25) Lui et moi sommes amis. Lui, c’est « mon » pote, c’est Berni. Le voyage, c’est mon idée, le Cercle Polaire, la sienne.

Mais ce sera en tandem, car il est malvoyant, proche de la cécité.

Avec sa canne à roulements intégrés, c’est un brise foule. Il ouvre les foules comme d’autres les mers, un régal …

26) Peut-être arrive-il un moment où seuls nos désirs nous portent, et nous oublions de vivre.

Plus de froid, plus de pluie, plus de faim ... rien, sinon nos inclinations.

Et voici l´existence trébuchant sur nos envies sans connaitre la joie primordiale, celle de se laisser porter par la Vie, ses détours et ses remous.



27) Si les Sami n´arpentent plus les fjälls, leur mythologie hante encore les reliefs et paysages du Sápmi (*).

Aussi n´est-il pas rare d´entendre, au détour d´un bosquet, l´écho d´un tambour sacré ou d´apercevoir, dérivant sur le lichen vert de gris, l´ombre d´un shaman honni.

(*) : La Laponie

28) Ce périple, jusqu’au Cercle Arctique, aura été un voyage d’une profondeur et d’une singularité inouïes.

D’une tristesse insondable aussi.

Qu’il reste ce qu’il n’a jamais cessé d’être … l’écho d’une parole.


      ``


29) C’était la vélochée du Lorrain Régis Fender jusqu’au Cercle Arctique qu’on retrouve aux éditions Lulu et sur son blog:

http://ragg.over-blog.com



C’était le Cercle Polaire Pour Régis Fender.

Pour retrouver sa méditation à travers le Sahara, déjà en Strida …
cliquez ici


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